Dans un cadre splendide, avec vue sur l’Arno, le Ponte Vecchio et les montagnes toscanes, les assiettes du restaurant Borgo san Jacopo installé dans l‘hôtel Lungarno tiennent leurs promesses. Les tables nappées de blancs et dressées au cordeau par l’équipe de Claudia Rosati ont réglé les derniers détails avant notre arrivée.

Aux manettes de la carte liquide, Salvatore Biscotti, sommelier passionné de l’adresse. Une fois n’est pas coutume, nous lui donnons le challenge d’un pairing totalement local.
Pour ouvrir ce qui sera un grand dîner, l’Italie traditionnelle s’installe à notre table avec de vertigineux gressins servis avec une fondante Ricotta di Buffala et une huile d’olive Reggeno. Une entrée en matière portée par deux verre pétillants de Cavaliere Nero, un pinot noir rosé, Trento Doc de la Maison Nevi élevé 9 ans en barrique.

Une ode au végétal

Ils laisseront place à deux mises en bouche : l’une saline avec un délicat filet de Sériole et caviar, acidifiés par la peau de la pomme rouge, basilic pourpre, pomme, yaourt. L’autre végétale, avec une pastèque travaillée comme un carpaccio, surplombée de pecorino, de roquette et de bulles de balsamique. Une technique simple mais ô combien efficace, qui retranscrit de façon bluffante la texture de la chaire animale. Un tour de force du chef, qui aime jouer avec les techniques, pour oser destabiliser.

Quelle autre belle surprise de voir que l’une des assiettes star parmi les entrées est végétale : une déclinaison de quinze variétés de légumes différents, enveloppés par les arômes soyeux du sorbet à la tomate et sirop de figue. Pour le porter, un vin rosé pétillant Leonia, alliant très justement le Chardonnay et le Pinot Noir. On comprend par cette proposition que l’une des ambitions du chef est la démultiplication des saveurs et la concentration des arômes sur des produits d’exception. Un travail gargantuesque sur les découpes, le dressage et une recherche poussée pour associer et marier aux mieux les saveurs de ces innombrables légumes.

Un vent d’iode

Le temps d’atterrir de la dégustation de cette sensationnelle assiette, un Pinot Bianchi de la maison Cantina Terlano élevé en barrique s’installe à notre table pour accompagner l’assiette d’Utah Beach. Une démonstration magistrale de la technicité alliée à l’inventivité, donnant un assiette chef-d’oeuvre : la crème de concombre se fond dans la laitue de mer croustillante et le campari. Le dressage est quant à lui un tour de force et nous fait presque culpabiliser de le décomposer.

De pâtes magistrales

Pour la suite, l’incontournable primi piatti : d’un côté des calamarata, servies avec sauce réduite et corsée où tout le génie tient dans le fourrage de chaque pâte avec de la crème de brocoli et estragon. De l’autre côté, des tortelli au jus de viande, poire épinard et fondue de Castelmagno. Magistrale, riche et pleine de relief, cette assiette de pâtes vient s’inscrire comme dans du marbre parmi nos meilleures souvenirs gustatifs.
Accords : Rosato di Pinot Nero Villa di Bagnolo 2013 Marchesi Pancrazi sur les tortelli et GIOIÈLLAE (GIOIÈLLÆ) Rosato 2018 sur les calamarata

La justesse jusqu’au bout

En primi piatti, un envoûtante pêche de ligne, pataugeant dans une sauce concentrée de green chili et tomate. Pour arrondir les saveurs, une mayo à l’air et quelques croutons embarqués dans ce tsunami gustatif. Audacieux de servir un vin rouge sur du poisson, mais accord réussit avec un verre de Monteraponi, Varon Ugo, en 2013.
Plongeon de bonheur bien terrien avec le cochon, oignons confits et moutarde de Dijon porté par un verre de Brunello di Montalcino 2009.

Deux sorbets bien frais pour se rincer le palais d’un côté et un baba au rhum servi avec glace au rhum et une crème de fraises. Un mariage d’amour entre la rondeur satinée de l’alcool et l’acidité de la fraise nouvelle.
Une belle ribambelle de mignardises pour définitivement clôturer le repas, avec un verre de Malvasia delle Lipari Passito DOC 2017

On nous avait prévenu, le chef Claudio Mengoni n’est pas un show man, c’est un discret passionné, qui sort difficilement de sa cuisine pour saluer ses convives. Pourtant il n’a rien à cacher, si ce n’est beaucoup d’humilité et de timidité attendrissante.

Pour conclure 

Avec une ambition maîtrisée, une envie de faire parfait, on ne serait pas surpris de voir cette table recevoir son deuxième macaron dans les mois qui viennent. Borgo san Jacopo est Sans conteste l’une des tables les plus étourdissantes de Florence, un concentré d’émotions fortes qui nous a fait vivre une expérience inoubliable.

Adresse : Borgo S. Jacopo, 62/R, 50125 Firenze FI, Italie