Le restaurant confidentiel d’un très bel hôtel Germanopratin
Il faudra être attentif pour espérer croiser cette adresse intimiste, qui ne se laisse pas facilement dévoiler aux regards indiscrets. En effet, avec son entrée mystérieuse, presque à la dérobée, le Restaurant fait partie de ces adresses destinées aux connaisseurs, amateurs d’art et épicuriens de Saint-Germain. C’est Rue des Beaux-Arts, que vous allez pouvoir la trouver, il faudra pousser la porte et vous pénétrerez dans un univers parallèle, préservé de l’écoulement temps.
Après avoir traversé un étroit couloir et croisé un bar boisé qui n’est pas sans rappeler les établissements de plaisir clandestins, on est accueilli en grande pompe par un puits de lumière, permit grâce une sublime verrière. Les couleurs vives et foncées du velours des assises, la décoration à mi-chemin entre ancien pur-jus et modernité nous laisse sans voix. On reconnait la touche de Jacques Garcia ayant investit les lieux en 2000. Le baroque prédomine mais l’esthète ne s’est enfermé dans aucun style mêlant avec audace, alcôves, moulures, rayures, vintage avec du très beau mobilier Empire I et du plus récent aussi.
En atterrissant au Restaurant, la plupart des gens ne sont pas sans savoir qu’il s’agit d’une table étoilé par le guide, avec à sa tête le Chef Julien Montbabut ancien du Ledoyen au coté de Christian Le Squer et Joana Thöny-Montbabut pour le versant sucré, finaliste du championnat de France des desserts en 2015. Ces deux compères se sont installés aux commandes de cette table anti-conventionnelle, ce salon privé, cet hôtel d’amour, bref un lieu idéal pour programmer un rendez-vous avec sa moitié de poire…
Un menu gastronomique de haute voltige
Amuses : Après avoir pris place dans ces délicieuses banquettes velourées, nos amuses débarquent en même temps que la carte. Le tout s’annonce coloré et plein de relief avec une galette de riz soufflée parsemée de curry, une tartelette orange-cramberry, un mini toast orné d’œufs de cabillaud, quelques croustillade de cèpes à l’ail ultra fondant et sésame…En bouche on alterne entre saveurs sucrées et salées, croustillance et fondance… un voyage au travers de quelques petites bouchées.
Après avoir découvert le menu, on part sur le dégustation en 5 services (95 euros par personne).
Une très agréable pré-entrée débarque avant de laisser place à la star de la table du Restaurant, le fameux Tourteau de Loctudy, que tout le monde s’arrache. Impossible pour le chef de le détrôner de la carte, tellement il est apprécié par les gourmets qui s’y attablent. Cette chair iodée relevée à la Savora ne fait son entrée seule mais est accompagnée d’une mousse yuzu et d’avocat (entres autres…) : Cette entrée (et c’est bien là tout l’art du chef), adopte un intitulé somme toute classique sur le papier mais est finalement teintée de créativité très justement dosée, faisant basculer ce plat dans le parfait. Entre la croustillance de la plaque transparente légèrement sucrée, la délicatesse de l’avocat et la noblesse de la chair, le tout allié à l’acidité du yuzu, on est véritablement ici face à un grande plat. Le chef a réussi a faire basculer nos papilles du côté du nirvana avec un je ne sais quoi que l’on souhaiterait retrouver dans chacun de nos plats.
Après cette entrée en matière, c’est au bar de ligne de prendre le gouvernail. Il faut dire qu’il a fière allure avec son jus d’arêtes pincées, recouvert d’un tartare d’huitres et d’une salades douces et amères. On sera tout de suite surpris par l’épaisseur de la pâte à ravioles homemade, qui apporte la dose de gourmandise à ce plat d’une véritable délicatesse. La justesse des saveurs qui se complètent toutes parfaitement, prouve encore une fois que le chef maîtrise sait jouer avec nos émotions.
C’est au tour de la sole “primeur de la mer” tronçon cuit sur l’arrête et son bouillon de crevette grise, enlaçant une jardinière de légumes iodés de saison de venir prendre place sur notre nappe. L’iode est ici à l’honneur, avec des moules parsemant notre gourmand bouillon, du céleri décliné à toutes les cuissons et des petites pouces verdoyantes venant colorer notre plat. La star de l’assiette est bien sur la sole, dont la chair de délaisse de son tronçon avec une déconcertante facilité tellement sa cuisson est parfaite. Il s’agit encore une fois d’un plat maîtrisé de bout en bout, qui aura définitivement su nous convaincre.
Après une petite pause, nous permettant de terminer nos verres de vin, on passe sur ce qui fera office de plateau de fromage condensé en un seul plat avec un lait de chèvre caillé, caramel de cumin, et confiture de butternut. Le chef est parti d’un constat simple : pourquoi venir s’appesantir avec du pain et du fromage alors qu’on peut clôturer le repas sur une note laitière, raffinée et légère ? La réponse est traduite au travers de ce plat, qui montre à quel point le classicisme revisité peut avoir de bons côtés…. On retrouve en effet toute la gourmandise qu’apporte le fromage en fin de repas, avec cet excellent chèvre caillé, monté en crème légère, que l’on vient généreusement tartiné sur de petites bouchées de pain toastés. Les équilibres se veulent parfaits entre le caramel de cumin, le sucré du butternut et l’amertume (très mesurée) de notre fromage. Un plat finalement très marquant qui aura une fois de plus su nous marquer.
Une belle attention au versant sucré
Vient ensuite le moment que l’on attendait aussi avec impatience : le passage du versant salé au versant sucré….
C’est avec un pré-dessert constitué d’un baba au rhum revisité,que Joana Montbabut se présente à nous. Il s’agit là d’un petit plat ludique, dont une bulle transparente renferme notre précieux liquide… L’apparence du gâteau aurait pu laisser voir une certaine lourdeur mais en bouche c’est tout le contraire ! Ca ressemble d’ailleurs plus à une brioche ultra légère et l’on vient généreusement l’imbiber de cet incroyable rhum pour finir par recouvrir le tout de pointes de crème chantilly des plus aérienne et vanillée… Une pré-bouchée sucrée des plus appréciables qui annonce un fabuleux dessert.
Ce sera l’Arlette, et sa crème diplomate ses pommes au four et ses raisins gonflés que la chef aura choisira de nous servir ce jour là. L’assiette est subliment dressée, tirée aux quatre épingles on regrette presque de devoir la déstructurer…. Au diable l’avarice, nous voilà en train d’analyser l’Arlette sous toutes ses coutures, les bouchées sont toutes plus intéressantes les unes que les autres, on découvre sous chaque palmettes de nouvelles surprises, délicieusement maîtrisées… Nous sommes émus et nos yeux pétillent de plaisir, Joana aura su déployer en deux assiettes ses meilleurs atouts pour convaincre nos papilles en soif de nouveautés.
Le café (sourcé mais dont nous ne nous souvenons plus la provenance), nous sera servi en grande pompe, accompagné de petites mignardises chocolatées et fruitées. On termine pour de bon ce repas sur une note torréfiée, prouvant une fois de plus que rien n’est laissé au hasard au détour de cette table.
Pour conclure
On admire la justesse et les équilibres savamment trouvés entre classicisme et modernité dans ce Restaurant dérobé de l’Hôtel. Le Chef Julien et la Chef-Pâtissière Joana, ont su élaborer un menu à leur image, en décrassant la gastronomie française de son trop plein de tout, pour n’en garder que l’essentiel en y apportant leur touche, reconnaissable parmi des centaines…
Bon à savoir :
Menu déjeuner décliné : 1 plat – 35 euros
Entrée plat ou plat dessert – 45 euros
Entrée, plat et dessert – 55 euros
Entrée, plat et dessert + eau minéral et 2 verres de vin 85 euros
Adresse :
13 Rue des Beaux Arts,
75006 Paris, France
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