A la table étoilée du Château de Mercuès le Duèze, officie Julien Poisot, un talentueux chef qui met en avant avec une équipe en cuisine, des produits d’exception sourcés localement chez des artisans aux valeurs ancrées.
Une étoile en terrasse
Quoi de plus plaisant que d’entamer un dîner en terrasse encore ensoleillée, avant de rejoindre la table d’hôtes installée en plein coeur des cuisines…
Nous serons gâtés d’amuses au dressage très appliqué : macaron betterave, crémeux chèvre basilic, rouleau navet boule d’or, câpres encrémées, carottes en bâtonnets sur chips de pain grillé. On perçoit avec cette proposition, une inclinaison végétale fort appréciable pour ouvrir le bal d’un repas mémorable.
Après avoir pris place au premières loges de la cuisine flambant neuve, une mise en bouche iodée et sélective nous accueille : le chef nous propose une assiette de caviar bien garnie où la simplicité révèle toute sa splendeur. Difficile de trouver à redire.
Une créativité hors du commun
Quelques minutes de patience attentistes et observatrices de l’effervescence d’un début de servir au coeur des cuisines, pour voir se pointer une grandiose entrée : courgettes, radis Daikon, perles du japon, wasabi, herbes et fleurs. A l’annonce de l’intitulé, on se demande si un chef français vient bien de parler de perles du japon, celles que l’on aime tant et que l’on ne trouve jamais travaillées dans nos assiettes salées.
Une grosse cuillerée pour attraper toutes les textures, délicates, mais ô combien savoureuses et sublimées par le wasabi. Les courgettes sont délibérément les stars de l’assiettes, qui délivrent leur parfum enivrant à chaque bouchée.
Avec, viendra une déclinaison de pains : au houblon, pomme de terre-thym, classique…, un plaisir de voir une telle attention portée aux marqueurs d’une bonne table, dont le pain fait partie. Grand moment de gourmandise d’ailleurs, en sauçant généreusement le fond de crème au wasabi, sa mariant à merveille avec les saveurs céréalières du houblon.
Un homard fabuleux
Pour la suite, mes notes indiques : “plat monument iconique, très identitaire et bourré de caractère avec du relief ” et mes souvenir intacts le confirment.
On se pince en dégustant le fabuleux homard breton servi dans toute son épaisseur avec des girolles et ravioles à l’encre de seiche, rehaussés par un condiment poivrons-tomates et piment d’Espelette. Le tout sera servi avec un jus des têtes, ultra corsé, l’extase totale. On l’accompagne d’un Haute-Serre en 2010, cuvée Prestige, pour compléter ce moment de pur magie.
Une succession rythmée et incisive
On passe ensuite au sandre servi sur peau et travaillée à la graisse de canard. Il est accompagné d’une gourmande déclinaison de légumes – daikon, fleurs de courgettes – avec un jus de tomates, dressés au millimètre. Au chapitre vin, ce sera le Chenin sec de Mercuès en 2015, plus ample et aromatique que les Chenin de Loire dont nous avons l’habitude : une parfaite association pour tenir tête à l’amplitude de la noble chaire.
Le foi gras du Gers poêlé a du coffre et fait partie des plats phares du chef : servi avec une brunoise de courgette et pignons qui transpire les saveurs du sud, quelques artichaut barigoules bien sentis, pickels, raifort pour dynamiser le tout. Si la technique est complexe, c’est bien pour laisser s’exprimer la simplicité parfaite de l’assiette au palais.
Le Saint-Pierre poché, sera une grande assiette (encore !) : avec son beurre d’aromates, petits pois, tapenade olive anchois, purée d’ail, la laitue braisée l’accompagnant aurait pu paraître surannée, mais c’étant avant la première bouchée… Rehaussée par un poivre de Sichuan venant sublimer les saveurs de toutes les ingrédients de l’assiette. L’harmonie fonctionne finalement à merveille. La sauce esprit “soupe de poisson”, avec un consommé de homards et épices n’y est d’ailleurs pas pour rien dans cette réussite.
Bien que repus, on ne pourra refuser l’assiette de fromage de producteurs, portée par un verre de Malbec du Château de Mercues 2014 : trappe de Echourgnac, Rocamadour,… C’est tout simplement bon.
Même les desserts marqueront les esprits avec une belle “Fraise” dans tous ses états, flanquée d’une glace au fromage blanc, des notes de yuzu et une sélection de fruits de saison, une assiette tout en légèreté et finesse. De l’autre côté un imposant soufflé à la mangue, pourtant léger comme un nuage au palais. La rondeur de la mangue s’allie parfaitement à la gourmandise du soufflé… une clôture en beauté avec un Gaillac 2008, Château Baron par Georges Vigouroux.
Quelques mignardises pour conclure (définitivement) avec cette tarte citron revisitée en coque, un dôme framboise et un chocolat passion.
Pour conclure
Le Duèze est une table au classicisme moderne, qu’il est difficile de faire rentrer dans des cases tellement elle rompt les codes des tables françaises. Le produit est roi, porté par une exigence palpable, une rigueur et finesse digne des plus grands, dont Julien Poisot fait partie. Le talent de toute l’équipe en cuisine (d’ailleurs très féminine) se dévoile tout au long du repas, avec des assiettes identitaires, toujours surprenantes et pourtant si accessibles… Un moment de pur bonheur assuré.
Adresse : Rue du Château, 46090 Mercuès
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