Le Chiberta : Une étoile du 8ème
Le Chiberta, table étoilée décorée par Wilmotte – marqueurs rouges, noirs et blanc à la clé, propose une épopée gastronomique tout en finesse et pleine de relief à deux pas des Champs-Elysées.
L’atmosphère, grise et feutrée, fait son effet dès l’entrée, et ancre le démarrage d’un moment hors du temps. A table, une vaisselle soignée signée Guy Degrenne, une coupe de fines bulles brutes de la Maison Guy Savoy pour nous accueillir et quelques amusements bien sentis, dont un cake au fromage et un soufflé sésame.
On prend vite nos aises dans ce cadre au style contemporain, surtout quand débarque le beurre Bordier aux algues, un classique dont on ne se lasse jamais, bien accompagné d’un pain blanc ou d’un pain complet.
Après découverte de la carte et du menu dîner, avec un prix dans la fourchette médiane des étoilés parisiens, on ouvre officiellement le bal avec le croustillant de riz, crème de marron, surplombé de poutargue et de sauge : une bouchée racée et efficace.
Des assiettes-institutions
Le Chiberta donne l’occasion de goûter l’incontournable et indémodable velouté d’artichaut de Guy Savoy parfumé à la truffe noire… avec sa brioche feuilletée au parmesan, indispensable pour l’accompagner et atteindre le comble de la perfection en toute simplicité. Si les plats signatures existent, ce velouté en justifie pleinement la raison.
De l’autre côté de la table, une Noix de Saint-Jacques de Normandie en compression, au visuel engageant, entouré d’une algue nori, et sa crème d’orange / thé lapsang souchong : cette appétissante recette revisitée est une tranchante réussite, parfaitement balancée entre la subtilité de la Saint-Jacques et l’acidité de l’orange en résonance avec le thé.
Le sommelier nous proposera un verre de Faune, du Moulin de Gassac, 2016, (Viognier / Chardonnay) dense et équilibré, tenant bien tête à nos plats de caractère.
La suite mettra à l’honneur une cuisine savoureuse aux visuels toujours très engageants, avec notamment cet Omble chevalier poché et sa sauce Apremont – oseille et ses délicieux poireaux grillés disposés sur la chair. Pas de quoi s’ennuyer donc, surtout en dégustant ce poisson si intéressant et pourtant trop rarement proposé. La sauce gourmande appelle aussi bien le gras que la fraicheur et nous mènera jusqu’au plaisir d’une grosse mouillette de pain, l’apothéose !
C’est avec un surprenant Chardonnay des Côtes du Jura (Fruitière le Voiteur) que l’on tranchera cette étourdissante assiette, avec un liquide salin et fruité en bouche.
On enchaine ensuite avec le Rouget Barbet à la plancha et sa vinaigrette à la moelle, accompagné d’une purée de potiron à la coriandre et son jus très corsé. Le Mâcon Lugny de Joseph Drouhin que l’on adore – un nectar particulièrement gourmand – vient booster avec brio la salinité de l’assiette. Pour une fois, le service n’est pas chiche, et laissera la fiole de sauce pour que l’on puisse à notre guise, avec beaucoup de gourmandise la vider, puis la saucer et la re-saucer… Le chef Stéphane Laruelle témoigne ici d’un réel savoir-faire, la chair étant ici parfaitement traitée, croustillante en surface et tendre en plein coeur.
En face, on s’émerveille de la selle d’agneau entourée de topinambours crispi-fondants, et d’une cremolata aux noisettes du Pièmont… Une fois n’est pas coutume du Bourgogne s’invite à notre table, « Les Clos Prieur » du Domaine Bernard Munier : il en fallait du caractère pour accompagner cette puissante assiette hivernale !
Une clôture en beauté
Le sublime plateau de la maison Quatrehomme suffira pour nous convaincre de nous enfromager. Les réjouissances continuent donc avec cette maison connue pour son excellence. Le chèvre et le Comté nous rappelleront que l’on se prive trop souvent de ce plaisir transitoire qu’est le fromage de fin de repas.
Nul besoin de rappeler que les desserts sont souvent le parent pauvre – même des restaurants désignés. Ils se tiendront ici plutôt bien dans leurs assiettes, avec un agrume en terrine (pamplemousse orange) accompagné de son sorbet au Thé Earl Grey et son sablé crispy délicieux en guise de pré-dessert. La sucrosité mesurée de la proposition permet de passer avec intelligence du versant salé au versant sucré.
Le Jurançon, « Ballet d’Octobre », 2014 du Domaine Cauhapé accompagne la clôture de ce dîner, qui passera par L’exotique, une mousse légère noix de coco au cœur coulant mangue-citron vert. Côté bilan carbone on est pas au top, mais en bouche c’est pétillant, frais et racé, on adore !
Avec une telle régalade on ne pouvait que terminer le repas sans une tisane, qui viendra accompagnée de ses délicieuses mignardises aux notes chocolatées…
Pour conclure
Aussi à l’aise en diner romantique qu’en diner d’affaires, Le Chiberta est un restaurant gastronomique particulièrement classe et raffiné, proposant une cuisine française gourmande, bien enracinée mais contemporaine. Il confirme l’excellence et la rigueur de Guy Savoy, qui a su avec brio donner les rennes du restaurant au chef Laruelle.
Adresse :
3 Rue Arsène Houssaye,
75008 Paris
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