Comme nous l’écrivions dans notre article teinté d’éloges en 2017, ERH est un restaurant confidentiel du quartier Montorgueil, logé au fond de la Maison du Saké (ERH tient pour Eau, Riz, Homme – ses 3 ingrédients) et aux accents logiquement franco-nippons. Le restaurant puise d’ailleurs dans ce voisinage une profonde inspiration pour des accords Mets – Saké inspirants, qui permettent d’apprécier vraiment toute la diversité et la finesse du sacro-saint breuvage japonais. Ce voyage hors du temps vécu en 2017 fut pour nous une véritable révélation, et l’un de nos grands coups de cœur gastronomiques à Paris de ces dernières années. Nous annoncions d’ailleurs dès 2017 que « Cette table n’attend que son étoile… ». C’est désormais chose faite, avec ce premier macaron décerné – trop tardivement – en 2019 !

Flash forward : en ce mois de février 2021, grisé par la pandémie et le couvre-feu à 18h, une envie irrésistible de voyage gastronomique s’empare de nous. L’occasion de tester l’offre à emporter d’ERH : elle s’impose rapidement comme une évidence, tant nous restons marqués par l’expérience, et curieux de la voir transposée « à la maison ». Après une expérience commande-livraison fluide, nous recevons notre élégant sac et ses deux cartons parfaitement packagés, dans un subtil univers graphique noir et blanc, tout en poésie.

En ouvrant les différents éléments avec l’impression d’ouvrir des cadeaux de noël, on comprend rapidement le fonctionnement du concept, parfaitement pensé : un ensemble de plats sous vides, numérotés et assortis d’un guide explicatif dans lequel se trouve, pour chaque plat, un QR code qui renvoie à une vidéo explicative de quelques secondes. Le résultat ? Des préparations déjà faites et un nombre limité d’actions (essentiellement de la cuisson au bain marie ou, dans notre cas, au Vitaliseur de Marion) qui permettent de concentrer les efforts sur les magnifiques dressages.

Grâce au travail sophistiqué des équipes du restaurant, le résultat de cette expérience Do it Yourself est franchement réussi : pas de prise de tête, dressages ludiques et esthétiques, saveurs concentrées grâce au sous-vide – l’opposé de notre expérience avec le menu du restaurant KGB, où la complexité prenait le pas sur le plaisir, pour un résultat souvent mitigé.

Autre avantage : l’approche sous vide permet également de conserver le rythme du dîner sans passer la soirée derrière les fourneaux, tout en garantissant un résultat impeccable en cuisson. Jugez plutôt avec ce trio d’amuses-bouches, aussi somptueux que délicieux. On pourrait (presque) croire qu’ils sortent tout droit des cuisines du chef ! Coup de cœur notamment pour ce mémorable tartare de betterave au Shiso rouge : puissant, relevé et d’une étonnante gourmandise.

Côté plat, on fond pour ces Saint-Jacques poêlées et ravioles persil – poireaux, qui pataugent fièrement dans un élégant velouté de panais… Frais, onctueux, parfumé, gourmand : on y plonge généreusement nos miches jusqu’à la dernière goutte.

En dessert, l’étonnante forêt noire à l’agrume japonais sudachi ne vous demandera strictement aucun effort, si ce n’est de le sortir du frigo ! Dans le verre, la découverte d’un agréable saké pétillant pour accompagner les amuses-bouches, et, en fin de repas, un élégant thé sourcé par Kodama, les passionnés voisins situé à quelques numéros d’ERH.

ERH, libre comme l’air, confirme avec ce menu son intelligence et sa sensibilité hors du commun, en parvenant à nous faire vibrer à la maison (presque) autant que dans son excellent restaurant. Bravo au très talentueux chef Keita Kitamura et ses équipes : on a encore plus hâte de revenir vous voir, cette fois-ci on l’espère pour de vrai !